Publié le 27 Février 2017
Il y a pas si longtemps j'écrivais un article « 20 ans après et c'est pire ». Pour l'instant cela se poursuit, telle la déclaration de Fillon, pour enfumer et faire le buzz afin que l'on oublie son affaire, « la France en état d'insurrection », à se demander s'il ne s'inspire pas Fox NEWS qui, il y a quelques semaines, ciblait tous les quartiers de Paris ou régnait l'insurrection. Jamais élection n'a revêtu autant d'importance. J'ai déjà écrit que ce que l'on définit comme l'antsystème et un mouvement qui dépasse la seule sphère française, dans bien des pays se développent des antisystèmes, qui devant le vide idéologique se précipitent vers des partis fascisants. Cela s'inscrit dans processus d'intolérance qui se poursuit et auquel contribuent pas mal d'hommes politiques en surévaluant des situations que répercutent aussitôt les médias avides de sensations bien ou mal intentionnées. Chacun se souvient de l'intolérance zéro, du risque zéro, du principe de précaution tous ces concepts excluent l'aptitude à l'analyse et forcément se vouent inexorablement à l'échec.
Quand une population fait l'adepte de ces concepts, elle ne peut que se diriger vers le fascisme ou la dictature. Ce qui est particulièrement observable c'est que ceux qui ont développé ces concepts pour faire preuve d'autorité et de « sécuritarisme » les voient se retourner contre eux. En France ils se sont fait expulser au cours des primaires et il ne reste plus que trois candidats à éliminer au premier tour, Fillon, Macron et Hamon, ce sont les hommes de la continuité, malgré un Hamon qui habilement a laissé croire un possible accord avec Mélenchon .
Il y a quelques temps Macron déclaraient que les jeunes devaient tout faire pour devenir millionnaire. Cela nous change de ceux qui gagnent 100 000 € mois et qui expliquent à ceux qui ne gagnent que 2000€ que leurs difficultés proviennent de ceux qui gagnent 500 € mois. Mais au bout du compte qui peut croire Macron ; et bien force est de constater qu'il y a beaucoup de citoyens. Il semble que Macron soit le numéro gagnant de la loterie nationale. 83% des Français depuis environ 2006 sont opposés aux partis, (cevipof), il a trouvé sa place ni là, de droite ni de gauche, mais monarque. Il fait signer à tous ceux qui veulent briguer la députation un engagement à n'appliquer que son programme présidentiel. Et cela plait aux citoyens qui si souvent reprochent aux hommes politiques de ne pas tenir leurs promesses électorales. Sauf que c'est anticonstitutionnel :
Tout mandat impératif est nul.
Le droit de vote des membres du Parlement est personnel.
La loi organique peut autoriser exceptionnellement la délégation de vote. Dans ce cas, nul ne peut recevoir délégation de plus d'un mandat.
Il est temps que l'on sorte de cette monarchie républicaine quinquennale, là c'est clair l'on est face à un dictat qui en dit long pour qui aura le malheur de s'opposer et pourtant il semble si gentil. Si nous en sommes arrivés à ce stade où il y a un dénie de démocratie, car la démocratie ce n'est pas seulement voté tous les cinq ans pour son tyran, c'est dû à un lent processus intolérance dont déjà en 2001 j'en avais d'écrit le déroulement.
« La grandeur de l’homme débute quand il commence à se voir tel qu’il est. »
Citation sans exclusive, dont l’universalité embrasse l’ensemble des constituants de la société, du délinquant à la victime, qui ne sont que ses produits.
Il apparaît très clairement la dichotomie vers laquelle nous basculons et vers laquelle nous sommes entraînés. Des citoyens qui se désolidarisent de leurs semblables au non de leur intérêt catégoriel, incapables de disposer d’une vision globale, suggestionnés en permanence dans la recherche d’un égoïsme par des illusions mercantilistes, telle celle d’autonomie ou d’indépendance ; se choisissant des politiques économiques générant de l’exclusions, telle la loi du marché ; et reconduisant à tour de rôle les mêmes hommes politiques qui ont démontré leur incapacité à apporter des solutions efficaces. Les citoyens génèrent par leurs choix les maux dont ils se plaignent, en croyant qu’ils ont à faire à un phénomène exceptionnel, parce qu’ils nourrissent par leur voyeurisme les lignes des journaux et actualités télévisées qui repassent en boucle les mêmes informations et recherchent celles de même nature à partir du moment qu’il y a de l’audimat et de la vente. Devant une telle boucle suicidaire, on ne peut que s’interroger sur l’aptitude citoyenne des français à disposer d’une capacité transgressive de jugement.
De plus, les sociétés modernes sont de plus en plus orientées vers la recherche du risque Zéro comme je l’ai écris. Ceci est le résultat d’une désaccoutumance aux risques divers, due aux progrès techniques et sociaux, ainsi qu’à la prise en charge du règlement des conflits par l’État ; les seuils d’intolérance au risque et à l’anomalie sont grands, et l’application du principe de précaution devient le mode de gestion des problèmes. Celui-ci permettant aussi aux décideurs de s’exonérer des responsabilités, face à la judiciarisation de nos sociétés.
Cette intolérance grandissante se manifeste encore plus pour les problèmes de délinquance. Et l’on se trouve en présence d’une société qui réclame un plus grand contrôle externe, tout en stigmatisant l’interventionnisme de l’État, cherchant à enrayer un phénomène qu’elle produit.
La caution scientifique est un prétexte facile pour pratiquer de la répression camouflée et donner bonne conscience à l’ensemble de la société.
Prévention scientifique des délinquants, identification de la population criminogène (mathématiciens qui parlent de modéliser les comportements humains).
Alors que l’enfant désocialisé est en grande partie la conséquence de boucles de rétroactions sociales, on cherche à prévoir sa venue comme s’il était en fait la cause initiale, au motif qu’il présente une cause potentielle future.
Il pourrait y avoir en germe, l’émergence d’une espèce d’eugénisme moderne, incompatible avec les fondements de la démocratie. On ne recherche pas à traiter un problème, mais on voudrait éliminer les conséquences en les désignant comme causes.
Il y a une inversion du social et du répressif, en ce sens que la « répression » ferait prévention, et le social ne ferait qu’accompagner la sanction pour les crimes et délits ayant échappé aux méthodes de prévention.
On se trouve ainsi dans une société dichotomique, dans laquelle les intérêts particuliers contradictoires, poussent vers une plus grande liberté pour des groupes économiques (les dominants systémiques), dont les conséquences économiques et sociales génèrent une société de plus en plus contrôlée, à la demande même de ses membres.
Cette « autonomie doublement contrainte », et la dichotomie sociétale, provoquent chez les individus une dissonance cognitive qui induit des perceptions faussées. Ces perceptions modifient les repères, provoquent des représentations manipulables et manipulées au gré des intérêts particuliers. Cela permet aux plus habiles d’élaborer des stratégies d’acteurs qui sont présentées comme des courants de pensée libérale, où la «liberté » s’obtient sous une surveillance de plus en plus contrainte sur la manière de penser et d’être de chacun.
Lorsque nous lisons notre histoire, nous pourrions croire que nous choisissons de vivre dans une dictature où sous un régime fascisant. Le drame c’est que l’on y glisse sans s’en apercevoir, et cela, en trouvant normale et démocratique les mesures totalitaristes ou fascisantes qui s’installent. Ceci parce que comme je l’ai souvent écrit chaque citoyen abandonne son pouvoir de citoyen. Et que par dogmatisme nous refusons d’admettre l’échec social visible d’une économie de la loi du marché dont les adeptes nous proposent, pour s’en dédouaner, la cause des maux comme sa source.
Il y a bien sûr le débat politique qui met en avant des citoyens présidentiables, mais croire que c'est le choix d'un homme qui renversera la situation n'entraînera que désillusion, si nous ne comprenons pas que la violence de cette société est de notre fait et non de ces hommes, même s’ils mettent de l’huile sur le feu. Mais de ce qu'ils représentent et de l'apathie et de l'ignorance d'une majorité de la population qui joue au loto pour être millionnaire quand elle ne peut pas placer ses revenus pour en retirer des intérêts.