: Mélenchon sera-t-il plus productif que le PS ?

article écrit le 16 novembre 2009.

Une fois de plus, ce sont la turpitude médiatique et la médisance qui nourrissent les discours sur le PS et sur Madame Royal qui, à l’instar de M. Sarkozy, occupent l’espace médiatique dans des finalités différentes : l’une vise à éviter l’anonymat en vue de 2012, tandis que l’autre consiste à divertir l’opinion en exploitant des thèmes sécuritaires – thèmes qui ont assuré une élection et dont le maintien permanent ferait espérer une réélection en 2012. La disparition de l’axe droite–gauche a transformé le champ politique, réduisant ainsi les contradictions de fond et facilitant, en l’absence d’arguments solides, une surenchère d’affirmations.

La stratégie de dramatisation et d’avilissement du politique se poursuit, grâce à des médias qui instrumentalisent autant les faits divers que les catastrophes, alors qu’il est désormais établi qu’aucune corrélation n’existe entre l’intensité médiatique et l’ampleur sociale d’un événement.

La médiatisation d’un fait divers relève donc d’un choix politique, et les discours de Nicolas Sarkozy n’hésitent pas à aller jusqu’au mensonge le plus flagrant, comme en témoignent certains articles.

La stratégie de criminalisation frôle la frénésie pénale et remet en cause les principes généraux du droit, lesquels constituent les fondements mêmes de l’État de droit et, par extension, de la démocratie.

Le maintien de l’ordre se mue en une gestion du risque – doctrine centrale de toutes les professions concernées –, au nom de l’application d’un principe de précaution qui se veut mirifique. Il en résulte une doctrine et une pratique uniformisées des forces de police et de gendarmerie, axées sur le fichage généralisé de la population et la vidéosurveillance.

Le risque hante les consciences collectives et alimente une inflation du système sur lui-même. Le fait divers est ainsi médiatisé autour, presque exclusivement, de la figure de la victime dans un courant émotionnel intense.

Il s’agit de l’impasse de la guerre et de la peur, fondée sur des probabilités et une résilience impossible. C’est l’impasse inhérente à un discours politique qui magnifie sans cesse peurs et risques, au point que l’on ne sait plus si ce sont les politiciens qui dirigent l’opinion ou bien si ce sont les faiseurs d’opinion qui privilégient certains thèmes. De cette impasse, les partis politiques devraient se dégager pour redonner corps à leurs débats – ce qui, hélas, n’est guère le chemin emprunté aujourd’hui.

J’ai quitté le PS dès qu’il s’est mué en social-démocrate en reconnaissant la primauté de la loi du marché – et j’en ai déjà parlé par le passé.

Pour faire avancer l’Union européenne et aboutir à l’euro, F. Mitterrand a dû accepter les conditions imposées par la République fédérale allemande en déclarant l’autonomie de la banque centrale, conférant ainsi aux banques le monopole d’émission monétaire et transformant les États en simples clients du marché financier. Nous payons aujourd’hui cher cette décision, mais chaque président a ses lubies et ses obsessions pour faire avancer l’histoire – au détriment des citoyens, contrairement aux marchands qui, quant à eux, semblent dicter ces décisions.

Je traite ici d’un sujet que je maîtrise, ayant souvent échangé avec le patronat. Ce dernier dénonçait, en effet, l’instabilité financière générée par la fréquence excessive des élections (attribuée au « spectre communiste ») et estimait que la création monétaire devait échapper à l’emprise de la puissance publique.

C’est donc le PS qui a agi ainsi, contribuant à la dégradation de la situation salariale. Il fut celui qui mit fin à l’esprit de classe unificateur des salariés, malgré l’image du communisme et de la dictature du prolétariat, combattue de longue date.

Ensuite, pour démontrer ses capacités de gestion – et contrecarrer l’incompétence que lui reprochait la droite –, il imposa aux salariés des mesures de régression qu’ils n’auraient pas acceptées dans un contexte de gouvernance de droite. Je n’oublie pas non plus les grandes réformes telles que les CP ou les trente-cinq heures, mais face aux dénationalisations et au renoncement à orienter l’économie pour satisfaire au dogme libéral de la Communauté européenne, le PS en a perdu son identité et en paie aujourd’hui le prix.

En fin de compte, il s’est retrouvé à gérer une organisation capitaliste sans en réussir la socialisation.

Certes, on peut constater et accuser – comme le font les médias et les citoyens – les élites de ce parti. Mais c’est une erreur qui occulte le vote des militants, inscrits au fil des ans au PS, et qui, de l’intérieur, ont assuré sa transformation sous l’impulsion de Michel Rocard et de Jacques Delors. Ces militants n’étaient pas animés par une connaissance approfondie de l’histoire du socialisme « historique », mais furent influencés par une propagande unilatérale, véhiculée par la puissance médiatique, en faveur d’idées libérales capitalistiques qui s’infiltrèrent peu à peu dans le PS. Une fois de plus, la disparition du débat de l’axe droite–gauche a laissé place à une pensée unique, renforcée par l’effondrement de l’ex-URSS.

Ce phénomène s’est parfaitement illustré lors du vote du traité constitutionnel de l’UE, qui ne fut qu’une apologie du libéralisme capitalistique en érigeant la loi du marché en fondement d’un État – une situation invraisemblable quand on considère la misère qu’engendre, dans le monde, cette logique de répartition de la rareté, et que les militants du PS ont approuvée.

Après la chute du mur de Berlin, qui nous emporta dans un tourbillon dont nous sommes restés aveugles, j’avais posé à l’époque la question à un responsable du parti : par quel idéal allions-nous combler le vide laissé par le communisme ? La réponse fut la social-démocratie.

De surcroît, cette unité d’idéal centrée sur la « loi du marché » a suscité et alimenté un débat dans la course au « sécuritarisme ».

Je ne crois pas que le PS puisse se redynamiser, car le capitalisme (même déguisé sous l’appellation de « loi du marché ») ne peut offrir de l’espérance qu’aux seuls actionnaires.

Le PS, figé dans sa volonté de se retrouver aux commandes de l’État plutôt que de relever le défi que représente la pollution – défi qui, demain, pourrait engendrer une nouvelle forme de production et de relations économiques –, conçoit, à l’instar de tous les acteurs marchands, cette problématique uniquement comme une opportunité de maintenir une croissance favorisant les achats financiers des actionnaires. C’est le réalisme économique imposé par les marchands.

Notre organisation systémique actuelle touche à son terme : elle pourrait durer environ 50 ans, mais ne pourra pas soutenir indéfiniment l’augmentation de la population mondiale.

Face à cela, nous n’avons même plus le temps d’envisager une organisation alternative au système capitaliste qui, sans pour autant le détruire, initierait une « socialisation » menant peut-être à la suppression de l’actionnaire et du salariat, pour ne créer que de vrais partenaires économiques.

À mon sens, le PS est mort, puisqu’il refuse de rejeter la loi du marché vouée à s’éteindre. Je crois et j’espère que M. Mélenchon saura devenir un creuset de réflexion ouvrant la voie à un nouveau monde.

Notre existence est désormais située dans une ère de la communication fondée sur un procédé pavlovien : la répétition d’un mensonge finit par être acceptée comme vérité, et les illusions d’optique imposées au cerveau se transforment en réalité.

Nous ne pouvons sortir de cette impasse, qui nous entraîne inexorablement dans la régression, que par une éducation permanente à notre propre nature et à la complexité humaine qui nous définit. De cette démarche émergera sans doute une nouvelle forme de relation au travail, bien plus authentique que l’espoir déposé dans un génie censé détenir la compréhension absolue du futur et la solution à un nouveau modèle.

M. Mélenchon a su se dégager du carcan du mensonge pavlovien et des illusions d’optique ; j’espère qu’il comprendra qu’il ne s’agit pas simplement de s’opposer à un système, mais que cette démarche d’opposition puisse ouvrir la voie vers l’inconnu. Certes, il est issu du socialisme « historique », mais il s’est affranchi du modèle sclérosant de la pensée unique, ce qui, à mon sens, est essentiel.

Est-ce que cela sera productif ?

Pour l’instant, nous nous dissimulons derrière un leurre qui semble, de façon trompeuse, offrir une sécurité absolue, alors même que les atteintes aux libertés fondamentales – nées d’une fracture sociale – sont bien réelles. Il existe une contradiction permanente et fondamentale entre l’État de droit et l’État policier, ou entre la force du droit et le droit de la force, ce dernier glissant inexorablement vers une dérive totalitaire.

 

ce texte demeure une tribune engagée, certes tranchée, si interpelle le lecteur par la force de mes assertions. c'est pour renforcer encore l’impact de cette critique. Une consolidation des arguments par une argumentation plus factuelle et nuancée pourrait permettre d’ouvrir le débat, mais c'est le futur qui dira si j'avais raison

 

 

Rédigé par ddacoudre

Publié dans #critique

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